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LA DOUBLE MAÎTRESSE

louanges, avec grand soin de surenchérir assez sur ce qu’on pouvait dire pour donner à ses éloges un ton d’exagération plaisante, un air de jeu et de badinage qui lui permettait de se prétendre amoureux de Mlle de Mausseuil sans qu’on y pût penser rien de sérieux ni le prendre autrement que comme un divertissement sans portée et sans conséquence.

M. du Fresnay, homme simple et sans malice, se laissa tromper à ce manège de fausse bonhomie et se prêta à ce qu’il considérait comme un enfantillage. Il ne pouvait se mettre en tête que Portebize, déjà sur l’âge, perdu de jeu et de réputation douteuse, mais bon diable au fond, prétendît à quoi que ce fût qui dépassât les bornes d’une galanterie amicale avec Julie dont il aurait pu aisément être le père. Quant à Mme du Fresnay, voyant Julie amusée des assiduités et des compliments de l’officier, elle y prêta les mains volontiers. Le mari et la femme furent donc de moitié dans cette imprudence. Ils étaient bonnes gens, faciles et gais, et ne soupçonnèrent et ne prévirent rien des dangers de cette comédie ; aussi fournirent-ils à Portebize toutes les occasions d’approcher Julie à son gré.

Le premier usage que Julie fit d’elle-même fut la coquetterie et ce fut, pour dire vrai, cette disposition de la jeune fille qui régla celles de Portebize et encouragea ses visées. Il avait commencé par venir au Fresnay sans but précis et pour se distraire de l’ennui qu’il éprouvait à la monotonie du métier et au peu de ressources qu’il trouvait à