Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/414

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Veux-tu du vin, du citron ? J’irai chercher des raisins ; nous les mangerons ensemble comme le jour où tu m’as vue sur la terrasse. Veux-tu ? Je me coucherai sur ton lit, près de toi. Je tiendrai la grappe haute. Je la ferai tourner et je te mettrai moi-même les grains dans la bouche… »

Sa chemise était tombée jusqu’à la taille. M. de Galandot la regardait. Il lui caressa le bras, tandis qu’elle lui glissait la plume aux doigts. Il faisait un effort visible. D’abord le bec égratigna le papier, puis, toujours guidé par Olympia, M. de Galandot traça assez distinctement la lettre G.

Tout à coup, il poussa un cri muet qui s’arrêta dans sa gorge. Ses yeux se dilatèrent avec terreur ; Olympia tourna la tête et, en même temps que la porte s’ouvrait silencieusement d’une poussée invisible, elle sentit peser dans sa main la main de M. de Galandot. La plume brisée grinça aux doigts crispés.

Angiolino, debout, laissa lourdement tomber le flambeau, et ce fut dans la nuit que tous deux s’enfuirent épouvantés de la chambre funèbre dont la petite chienne Nina, qui venait d’y entrer ainsi, faisait le tour en reniflant, et, pendant qu’ils remontaient l’escalier les dents claquantes et le poil hérissé, la carline grimpait sur le lit et dressée sur ses pattes, sa langue rose au coin de sa bouche, elle flaira dédaigneusement le visage insensible de M. de Galandot ; puis, s’étant gratté le cou délicatement, elle sauta sur le pavé avec un bruit d’ongles et disparut légère, coquette et mystérieuse.