Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/81

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
LA DOUBLE MAÎTRESSE

ouvrit à M. de la Grangère et lui demanda conseil.

Mme de Galandot respectait fort son évêque qui, d’accord avec l’abbé, se résolut d’user de son pouvoir pour imposer à Mme de Galandot, au nom de la foi, ce qu’elle refusait à la parenté et, pour en finir, ils prirent le parti de brusquer l’affaire.

M. de la Grangère fit donc annoncer sa visite à Mme de Galandot sous couleur de prendre congé d’elle avant son voyage, et, un beau jour, vers trois heures de l’après-midi, le carrosse épiscopal entra dans la cour de Pont-aux-Belles.

L’évêque fut reçu à la portière par l’abbé Hubertet et par Nicolas de Galandot. Nicolas avait alors vingt-quatre ans et beaucoup d’embarras et de timidité sous l’habit de cérémonie revêtu pour la circonstance. On échangea des politesses. L’évêque s’excusa que le chanoine qui l’accompagnait ne descendît pas à cause de la goutte qui lui tenait les jambes gourdes. M. Durieu présentait, en effet, la mine rubiconde du parfait podagre. Sa corpulence remplissait exactement le cadre de la portière, qu’il referma sur lui quand, après les saluts d’usage, il se fut rassis au fond du carrosse où on le laissa.

La compagnie se dirigea vers le château. L’évêque marchait à petits pas de ses jambes courtes. Il était alerte et vif, et, en sa petite taille, de grande autorité. On le disait habile homme et adroit courtisan. Il avait fait un long apprentissage des brigues et des pratiques humaines et s’en était toujours tiré à l’avantage de ses amis et à la