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une frégate et alla détruire le fort et l’habitation de Saint-Castin. En conséquence de ces violalions multipliées de la foi du traité, M. de Callières, gouverneur de Montréal, avait été envoyé à Versailles afin d’exposer au ministère les raisons de toute nature qui nous mettaient dans la nécessité de combattre et, si possible, d’abattre la puissance anglaise en Amérique. M. de Callières se faisait fort, avec treize cents soldats et trois cents Canadiens, d’aller prendre Manhatte (New-York), Orange et les autres habitations de la Nouvelle-York. « Cette conquête, disait le mémoire qu’il soumit à Louis XIV, rendroit le roi maître d’un des plus beaux ports de l’Amérique, où l’on peut aller en tout temps, et d’un très beau pays sous un climat doux et fertile. On m’opposera le traité de neutralité ; mais d’abord les Anglois l’ont violé les premiers… En second lieu il faut observer que cette colonie étant actuellement toute remplie de Hollandois sur lesquels les Anglois l’ont conquise, ses habitants obéiront au prince d’Orange et forceront le gouverneur. Ainsi il faut les prévenir. Cependant, si on veut différer jusqu’à ce qu’on soit en guerre ouverte avec les Anglois, il faut se préparer pour le mois de juin prochain. »

Louis XIV acueillit favorablement les vues de ce mémoire ; d’ailleurs les événements, plus forts que sa volonté, vinrent bientôt couper toute autre issue que celle de la guerre. Jacques II, par son esprit d’absolutisme et par ses tendances catholiques, s’était aliéné l’esprit de la grande masse du peuple anglais. La révolution de 1688, qui lui enleva son trône et le donna à Guillaume d’Orange, irrita profondément Louis XIV et la coalition qui se forma ensuite entre l’Europe entière,