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Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/307

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Comment Pantagruel arriua en l’iſle Ennaſin & des
eſtranges alliances du pays.


Chapitre IX.


Zephyre nous continuoit en participation d’vn peu du Garbin, & auions vn iour paſſé ſans terre deſcouurir. Au tiers iour à l’aube des mouſches nous apparuſt vne iſle triangulaire bien fort reſſemblante quant à la forme & aſſiette à Sicile. On la nommoit l’iſle des alliances. Les hommes & femmes reſſemblent aux Poicteuins rouges, exceptez que tous hommes, femmes, & petitz enfans ont le nez en figure d’vn as de treuffles[1]. Pour ceſte cauſe le nom antique de l’iſle eſtoit Ennaſin. Et eſtoient tous parens & alliez enſemble, comme ilz ſe vantoient, & nous diſt librement le Podeſtat du lieu. Vous aultres gens de l’aulte monde tenez pour choſe admirable, que d’vne famille Romaine (c’eſtoient les Fabians) pour vn iour (ce feut le trezieme du moys de Feburier) par vne porte (ce feut la porte Carmentale, iadis ſituee au pied du Capitole, entre le roc Tarpeian & le Tybre, depuys ſurnommee Scelerate) contre certains ennemis des Romains (c’eſtoient les Veientes Hetrusques) ſortirent trois

  1. As de treuffles. « Le nez de mon bisaïeul était absolument pareil aux nez de tous les hommes, femmes & enfants que Pantagruel trouva habitant l’île d’Ennasin… il était fait, monsieur, comme un as de trèfle. » (Triſtram Shandy, liv. III, ch. LXXVI)