Page:Rabelais ou imitateur - Le Disciple de Pantagruel, éd. Lacroix 1875.djvu/33

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Comment Panurge feist crier à son de trompe, ainsi d’amasser gens pour venir à son service.

CHAPITRE II.


QUAND je vy que ma navire fut toute preste et toute faicte, laquelle estoit grande à merveilles, et non pas si grande du tout que celle que le Roy faict faire au Havre-de-Grace, je feis publier à son de trompe que, s’il y avoit aucuns gentilzcompaignons, gens de faict, qui me voullussent venir servir, que je leur donneroye si bons gaiges qu’ilz se tiendroient pour contens. Incontinent le cry et la publication ouye, se retirèrent par devers moy, en mon navire, cinq cens hommes de tous sorte, essorillez, gens de bien, et banniz.

Et croyez qu’en tous les cinq cens il n’y avoit homme qui eust aureille en teste non plus qu’au fons de la main, non pas, comme ilz disoient, qu’ilz les eussent perdues pour vertu qui fust en eulx, mais à cause qu’ilz s’estoient trouvez, comme ilz maîntenoient, ung jour qui passa par la mer, en l’isle de Brigalaure, là où les charcuytiers et pâtissiers font des saulcisses d’oreilles, lesquelles sont fort bonnes et friandes, à cause qu’elles sont demy de chair et demy de cartilaige,