Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/260

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Elle caressait les poils fins, irisés de Lion, et la chère bête, d’une langue savante, s’actionnant comme une experte femme de chambre à édifier une coiffure de bal, lui lustrait les cheveux.

On était en juin, on laissait le vasistas rabattu pour que l’animal pût s’absenter la nuit. Une heure ou deux, il courait les gouttières, puis il revenait vite, miaulant, ronronnant, rouinnant, rominagrobisant, ayant l’empressement comique de quelqu’un qui s’excuse d’avoir quitté la malade confiée à ses soins. Un soir, il rentra un objet blanc au cou, la physionomie furibonde, se roulant en pelote sur le tapis pour s’ôter ce désagréable collier de ficelle. Il portait une lettre. Laure sourit et lut la missive contenant cette unique phrase, écrite d’une belle écriture de collégien.

« Je voudrai bien vous voire. C’est-y possible ? » Le gamin avait eu l’idée d’utiliser les rendez vous nocturnes de Lion pour obtenir un rendez-vous personnel ; Laure lui répondit par le même courrier : « Oui. Vous connaissez la route ». Le soir suivant, elle se peigna longuement au miroir, mit sa robe rouge, le cœur moins serré, respirant plus librement, heureuse presque de se livrer à de nouvelles provocations. Ouvrier bijoutier ou fils de famille, un mâle c’est toujours le mâle ! Elle était absolument décidée à ne pas lui céder, et cependant elle ne voulait pas lui faire mauvaise mine.

Vers dix heures, Lion s’émut d’un grattement de