Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/154

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

À ce signal, l’orchestre préluda légèrement, gaiement, en ailes de papillons fous, puis les grands rideaux s’écartèrent sur un décor de neige d’une jolie facticité rafraîchissante, des collines blanches, des sapins de Noël, un tapis de givre cristallin, et, tout d’un coup, la féerie d’une lumière rose tendre illumina Polichinelle, le chanteur comique Lidot monstrueusement bossu et joyeusement multicolore. On lui fit une chaude entrée. Les jeunes hommes se déridèrent, les jeunes filles s’esclaffèrent comme des gamines devant le guignol des Tuileries.

Lidot chanta les couplets les plus permis de son répertoire, débita quelques monologues absurdes. On l’applaudit pour tout, et on en redemanda.

Les seigneurs de satin blanc passèrent des coupes. Lidot disparut sous les rideaux refermés. Il y eut un entr’acte.

Durant cet entr’acte, Mlle Marie Chamerot monta des scies, fit circuler le bruit que, très indisposée, la jongleuse attendue ne viendrait pas.

Dans un groupe on proposa de danser.

— Est-ce désolant, repartit le vieux diplomate sourd, accompagnant partout sa nièce et l’appuyant de ses gestes navrés, si elle allait nous manquer… On ne la remplacerait pas, elle !…