Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/303

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Sur l’honneur, je ne suis pas son fils, il a été généreux simplement ; car si j’avais été son fils, quand je pleurais, n’ayant rien à aimer que de méchants camarades qui me rudoyaient, il me l’aurait avoué. Non ! M. de Caumont est un loyal gentilhomme, il n’a pas une pareille faute dans son passé, j’en réponds. Madame, songez que ma mère, la laitière, est presque morte de faim… il ne l’aurait pas laissée mourir. Vous pouvez adorer votre mari, il le mérite, Madame la baronne.

Paul, les yeux humides, le teint rouge, ne pensait pas que ces confidences le mèneraient si loin. Après tout il disait la vérité pour qu’elle ne lui déclarât pas la guerre à cause de la protection du baron. Un homme est libre de faire le bien sans doute ! Il passait pour le fils de son garde-chasse justement pour éviter des histoires stupides. Mary fit un mouvement de joie.

— Alors, vous ne croyez pas que mon oncle ait eu un soupçon à votre sujet ?

— Non, Madame, je ne le crois pas… Cependant si je vous gène… et il fit un pas vers le corridor. Mary le retint par le poignet.

— Grand fou ! dit-elle en mettant dans ces mots une intonation remplie d’une soudaine tendresse.

Il s’arrêta. Elle riait.

— Je puis donc adorer mon mari ?

— Oh ! oui ! balbutia-t-il envahi par une atroce angoisse. Oui, adorez-le… il doit vous aimer tellement, lui !