Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/254

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— Hier soir, avant de m’endormir, en regardant l’heure à sa montre-bracelet, j’ai eu l’envie de compter ses cigarettes pour savoir combien il avait eu le temps d’en fumer avant de… Je le faisais quelquefois pour le gronder et lui défendre d’en abuser… pauvre petit ! Et j’ai vu ! Ah !… (elle se prit les tempes à deux mains) j’ai cru que je l’entendais hurler à mon oreille, de là-bas, du ravin, de toutes ses forces :

« Marianeau, il va me tuer ! »

Et moi, moi, je n’étais pas là, moi, j’avais refusé de l’accompagner, ce qui l’avait condamné.

— Une observation, interrompit le médecin, qui sentait que son client était condamné aussi, pourquoi, selon vous, Yves de Pontcroix l’aurait-il tué ?

— Parce que mon frère lui avait signifié son intention formelle de vivre avec nous, après notre mariage. C’est aussi pour… la même raison que je vous supplie de remplacer mon frère. Rassurez-vous, M. de Pontcroix n’aura pas envie de vous tuer. Au moins, a-t-il confiance en votre aveugle amitié, monsieur.

— Mais cela ne durera pas longtemps, car je me refuse, moi, à rester dans la maison d’un