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met de rêver est une joie. Un instant elle envisagea le couvent comme une joie.

L’arrière-cousine, Jane de Mallery était douce et bonne. Jadis elle avait ri, elle avait dansé dans les bals où toute la famille l’avait admirée, puis plus rien. Une nuit s’était faite. On savait qu’un joueur qu’elle avait connu s’était brûlé la cervelle.

Renée se rappela ce joueur. Elle eut froid par tous les membres. C’est qu’elle était, elle, l’assassin d’un joueur. Non ! pas le couvent ! on peut y vieillir !

L’orage se calmait. Les bougies tombaient en gouttes chaudes sur les reliefs rouges du cuivre, et Renée, perdue dans ses idées atroces, ne pouvait plus se relever. Elle avait glissé au milieu de la peau du lion, ses doigts serrant la crinière dans une convulsion machinale.

Rien ! rien ! Elle ne trouvait rien pour se fuir. Elle ne pouvait parler à personne, pas même à lui. Et puis on ne fait des confidences horribles que dans les romans où on rencontre des gens qui écoutent jusqu’au bout. Ensuite, elle n’était pas seule à porter le poids de son amour… Il l’aimait, lui Nono, lui l’enfant. Si elle s’enterrait vivante, il irait l’exhumer, elle en était sûre. C’est immense, la passion d’un vierge, parce que les sens ne lui apprennent pas que les faiblesses physiques sont là pour y mettre des bornes. Lui dire la vérité, ce serait le tuer sans retour. Un moyen existait, peut-être plus mauvais pour elle, mais plus prompt pour lui. Se marier avec un homme qui passerait.