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nono

C’est comme l’autre oiseau de nuit, ce pimpant qui me demandait la maison de M. Maldas, et il avait le nez dessus. J’ai encore sa pièce ronde. Tout de même, elle se romprait bien les os !… ce serait dommage ! Une jolie fille quoique peu parlotte !

Et afin de mieux atteindre ses feuilles, il essaya de se jucher sur la vache à moitié endormie.

Au bout d’une demi-heure, Mélibar tourna et se mit à redescendre la colline. Où allait-on ? Ce secrétaire devant lequel on l’avait humilié lui portait malheur. Une route défoncée par les charrettes s’ouvrait, remplie d’ornières. Il vola dans les ornières, peu soucieux désormais de ses sabots délicats. D’ailleurs Mélibar possédait des jarrets d’acier et, n’eût été la chatouilleuse cravache de sa maîtresse, il n’aurait pas plié. Dans un passage difficile, une touffe de bruyères mauvaises, à épines, qu’on appelle des bruses, lui cinglèrent le ventre et déchirèrent la jupe de drap. L’amazone penchée sur l’encolure ne regardait rien ; elle paraissait inanimée, la brise dénouant ses cheveux la laissait absolument insensible. Un méandre du Gana se montra, couronné de joncs avec une bande d’oiseaux suspendus à leurs faîtes, et plus loin un coin de maison tapissé de houx. Renée passa, ne voyant ni le méandre ni le coin de maison. Mélibar se disait qu’il y avait vraiment du nouveau, et miss Bell suivant, toujours muette, se permit un hurlement plaintif, une humble demande de répit. Mlle Fayor sortit de sa torpeur. Elle fronça les sourcils. Quelque chose de hagard traversa ses