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nono

— Une femme morte ! »

Et ce quelqu’un s’arrêta pénétré d’un sentiment tout artistique.

— Ah ! quelle splendide apparition ! »

L’homme, aussi émerveillé que saisi de pitié, vint se mettre à genoux pour soulever le corps brisé de l’amazone.

— Comment peut-il se faire, continua-t-il, que son cheval emporté ne l’ait pas jetée à l’eau… Et où est son cheval ? Étrange aventure… l’aurait-on assassinée ?

Il transporta Renée sous un grand érable, en face de la mare sombre. Il put s’assurer bientôt que ce n’était qu’un évanouissement. Comme il n’apercevait pas de blessures apparentes et pas de traces de coups, il se rassura tout de suite ; un sourire vint même éclairer sa physionomie contractée nerveusement.

— Allons, murmura-t-il, voilà qui va bien ! »

L’amazone reprend un moment ses sens et s’écrie : « Où suis-je ». Le monsieur balbutie : « Ne craignez rien, c’est moi ! »

Elle s’aperçut que son corsage était défait, et retomba évanouie.

« Ma parole ! je m’ennuie moins depuis cinq minutes. C’est qu’elle est fort jolie… distinguée, taille souple… Je crois qu’il sera pourtant nécessaire… oui… remplissons le programme… »

Et après avoir, en vain, posé sous les narines de Renée un flacon de sels tiré d’un élégant étui, il commença à dégrafer le corsage. Il accomplit ce travail d’une main fort expérimentée, et, pour aller plus vite,