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nono

— Sauve-toi… je suis maudite… puis… tu le peux encore ! Ne te perds pas avec une infâme ! Va-t’en !. Va-t’en !… C’est lui ! je le reconnais !… »

Elle le couvrait de son corps pour l’empêcher d’être atteint par l’ombre surnaturelle.

— Tu es folle ! dit Nono.

— Non ! si tu ne me fuis pas, je me tue à tes genoux. »

Elle saisit son poignard laissé avec les parures, et elle appuya la pointe juste sur le petit cœur noir. Nono lui arracha son arme.

— Obéis… va-t’en ! » ordonna-t-elle, ne quittant pas l’ombre des yeux.

Il poussa la porte, se retrouva en pleine lumière étourdi, la poitrine bondissante, le sang à la gorge, cherchant quelqu’un ou quelque chose à pulvériser.

— Elle me fera damner !… » s’exclama-t-il en s’éloignant un peu pour tâcher de voir en face Victorien Barthelme.

Du côté des rochers, le jardin de Tourtoiranne n’était pas fermé. Un chemin surplombait la statue de la Diane et la coupole ; un chemin bordé d’une haie d’églantiers sauvages. C’était par là que l’espion avait dû arriver. Il avait escaladé la roche, redescendu audacieusement les parois de granit pour se cacher derrière la déesse.

Bruno fit un détour.

— On jurerait, en effet, que c’est ce Victorien, murmura le furieux en apercevant l’homme de profil. Si c’est lui… je l’écrase !… »