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nono

chez pas depuis une heure ! Au fait, vous dis-je, au fait !… »

Le général devenait pourpre :

— Qu’a-t-on jeté dans le puits que je vais demander au gouvernement ? Il se leva pour se planter droit en face du maire de Gana.

— Mon général, déclara celui-ci tout d’un trait, je vois que vous ne soupçonnez rien. Il paraît qu’un de vos protégés, commensal de votre hôtel de l’avenue d’Eylau est venu à Tourtoiranne, il y a six mois, et qu’il aurait été assassiné dans les environs. »

Le maire pâlissait en disant cela, car ce crime impuni dans sa commune était une assez vilaine note pour son genre d’ad-mi-nis-tra-tion.

Avant que Fayor fût revenu de sa stupeur, un domestique entra présentant une carte.

— Le juge d’instruction ! dit le général pétrifié.

— Voilà justement ce que je venais vous annoncer, murmura le bon maire terrorisé ; je craignais vos emportements et je tenais à vous prévenir. »

Le juge d’instruction, de grande taille, les traits austères, la barbe à l’anglaise, apportait un grand froid autour de lui.

Il s’avança comme un personnage toujours sûr de son effet et salua gravement. C’était un enragé royaliste, partisan du duc de Pluncey, qui n’avait accepté sa situation que pour entendre un huissier crier de temps en temps devant lui : « La Cour, messieurs ! »

Les meilleurs ont de ces marottes.