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Il avait vraiment le respect de la femme comme on l’avait au temps de la chevalerie, et il eût donné la moitié de son blason pour en rencontrer une bien inconnue, qu’il ne chercherait pas du tout à connaître et respecterait à en perdre la raison.

La fatalité veillait !

M. de Pluncey, élevé par un père royaliste et une mère pieuse, possédait des convictions royalistes et pieuses en dehors de son fatalisme, un fatalisme pouvant d’ailleurs passer pour de la politesse affirmative vis-à-vis de la Providence. Il croyait à Dieu, il le sentait dans ses nerfs à l’approche d’un orage et, poète par tempérament, il le voyait dans les pauvres, hommes ou femmes, qu’il secourait volontiers quand ils n’étaient pas trop sales.

Il se serait marié, mais il craignait certains commandements de l’église qui sont formels. Fort instruit, plus que ne l’est, ordinairement, un descendant de preux, il essayait souvent de concilier les miracles de jadis avec les découvertes modernes.

Il avait ce principe en philosophie que l’éducation peut empêcher les émeutes, manquerait-on de pain dans les masses. Après tout, il aimait le peuple, recrutant le plus de domestiques qu’il pouvait dans les classes incultes.

Il ne prenait pas la politique au sérieux, bien qu’il fût arrivé à Montpellier persuadé que cela l’amuserait énormément. D’abord, il aimait le travail comme tous les vrais grands seigneurs ; ensuite, lutter contre un homme était déjà agréable, à son point de vue.