Page:Rachilde - Nono, 1885.djvu/331

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
323
nono

d’apéritifs. Père Sancillot, vous êtes-vous lavé les mains ? »

Le paysan haussa le cou d’un mouvement de tortue.

— Pourquoi faire ? »

Jarbet eut un rire de Parisien que jamais rien n’étonne de la part d’un être des champs et entra dans la boutique.

Le pharmacien était un gros homme ventru, ni jeune ni vieux, avec des yeux verts de chat noir. Il regarda ce nouveau client et, comme il connaissait tous les siens, il manifesta une certaine surprise, histoire de commencer une conversation intéressante.

— Entre nous, je peux vous le dire, fit le policier en se lavant les mains, nous avons trouvé la clef du mystère… et elle poisse un peu, cette clef… un peu ! »

Il reflaira ses doigts, puis voyant la mine ébahie du pharmacien.

— Vous connaissez bien l’histoire de Tourtoiranne ? le secrétaire d’un général Fayor…

— Ah ! mon Dieu ! bégaya monsieur Chauvol consterné, il s’agit du crime de Maldas !

— Précisément, le crime sans cadavre ! Nous avons tout découvert aujourd’hui. Combien vous dois-je ?

— Oh ! presque rien : 50 centimes. C’est épouvantable ! Alors, il a tué… pour de bon ? il a tué, ce Maldas ?… »

Et le pharmacien terrifié n’osait approcher de sa devanture, tandis que le vieux cheval poussif toussait en regardant les bocaux multicolores.