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nono

veux que vous vous serriez la main. Ne m’en veuillez pas. Venez à la messe de mon mariage. C’est le 21 juin.

» Lilie qui vous offre son amitié. »

Cela sentait bien la femme préparant le trousseau.

Nono s’était dit qu’il n’irait pas. Mais Nono ne pouvait jurer de rien depuis qu’il était sous la domination d’un revenant.

Le fantôme froissa la lettre d’un geste fébrile. Ensuite, il examina longuement le visage du dormeur, si longuement que Nono, fasciné malgré ses paupières baissées, songea presque à ouvrir les yeux.

Alors le fantôme parut se rassurer. Il eut un sourire de douce compassion, et il se retira, abandonnant derrière lui sa pénétrante odeur de verveine.

Le général Fayor ne voulait pas que la famille d’un clampin comme Bruno vint errer chez lui. Défense avait donc été faite de recevoir tout ça, selon l’expression du Sabreur. Le pauvre Nono fut obligé d’aller au devant de sa mère, pour la prévenir.

La maman apportait la petite sœur dans un jupon superbe repassé la veille et elle en avait plein les bras. Bruno bouda.

— Je te demande un peu si c’est raisonnable de la porter ; elle a six ans ! »

Puis, le cœur gros de ce qu’il venait de dire, il la prit lui-même pour l’étouffer de caresses. Césarine riait, tapotant les joues de son grand frère ; elle avait des yeux taillés en pruneaux, le menton à fossette, et des boucles frisées tout autour du front.