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nono

— Ils sont parfois bien mal élevés, bégaya la mère.

— Non ! ce sont des répulsions qui ne se discutent pas ! »

L’incident fut clos. Quand Mme Maldas eut fait ses excuses pour Nono, elle remercia pour Césarine et prit congé. Renée donna des pralines à la petite, en se contentant de sourire. Ensuite elle regagna le château.

— Rien à faire, se disait-elle à mi-voix ; ou il ne sait pas, ou il est incorruptible… Mais c’est un étrange garçon ! Il y a des jeunes gens comme cela, encore… Moi, je ne l’aurais jamais cru ! »

Depuis près d’un mois Renée Fayor vivait avec la pensée horrible que Bruno Maldas avait été témoin de son crime ; là-haut, de sa croisée, il avait pu voir, elle s’en était assurée. Chassée de son lit chaque nuit par des terreurs affreuses et folles, la jeune fille avait pénétré chez Bruno pour lire ses lettres à Lilie et les réponses. Elle n’avait pas trouvé de confidences. Quelques mots seulement, très vagues, répondus par Mlle Névasson, au sujet d’une insensée courant la nuit. Mais Nono pouvait être un habile. Les rustres ont de ces retours intérieurs. Était-ce par chagrin qu’il voulait quitter le château ? Avait-il accepté ce collier tacitement, prévoyant une source de fortune qui daterait du jour ou plutôt de la nuit pendant laquelle avait jailli la source sépulcrale ? Et Renée sentait ses nerfs se tordre dans ses membres frissonnants.