Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/149

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seule étoit à plaindre, et que Montoni étoit seul à blâmer. Peu capable de saisir quelque idée morale d’obligation, elle n’en concevoit la force que lorsqu’on les violoit à son égard. Sa vanité souffroit déjà cruellement du mépris ouvert de son époux ; il lui restoit à souffrir davantage en découvrant l’état de ses biens. Le désordre de sa maison apprenoit une partie de la vérité aux personnes sans passion ; mais celles qui vouloient très-décidément ne croire que selon leurs désirs, étoient tout-à-fait aveuglées. Madame Montoni ne se croyoit guère moins qu’une princesse, étant souveraine d’un palais à Venise, et d’un château dans l’Apennin. Quelquefois Montoni parloit d’aller pour quelques semaines à son château d’Udolphe. Il vouloit en examiner l’état et y recevoir ses revenus. Il paroissoit que depuis deux ans il n’en avoit pas approché, et que le château étoit abandonné aux soins d’un ancien domestique, que Montoni appeloit son intendant.

Emilie entendoit parler de ce voyage avec plaisir ; il lui promettent des idées nouvelles, et quelque intervalle aux assiduités de Morano. D’ailleurs, à la campagne, elle auroit plus de loisir pour s’occuper de Valancourt, pour se livrer à la mélancolie en