Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/189

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hommes vinssent les joindre. Emilie s’efforçoit de goûter elle-même le calme de ce moment ; tout-à-coup une barque s’arrêta aux degrés qui menoient au jardin ; Emilie bientôt distingua la voix de Morano, avec celles de Quesnel et de Montoni, et bientôt elle le vit paroître. Elle reçut ses complimens en silence, et son air froid parut d’abord le déconcerter ; il se remit ensuite, il reprit son enjouement, et Emilie remarqua que l’espèce d’adulation dont l’accabloient monsieur et madame Quesnel, n’excitoit que son dégoût : elle auroit cru difficilement que M. Quesnel fût capable de tant de soins, car elle ne l’avoit jamais vu qu’avec ses inférieurs ou ses égaux.

Dès qu’elle put se retirer, ses réflexions presque involontairement se portèrent sur les moyens possibles d’engager le comte à se désister de ses prétentions ; sa délicatesse n’en trouva pas de plus efficace que de lui avouer une liaison déjà formée, et de s’en remettre à sa générosité pour sa délivrance. Néanmoins, quand le lendemain il renouvela ses sollicitations, elle abandonna son projet ; il y auroit quelque chose de si répugnant pour son orgueil à dévoiler te secret de son cœur à un homme comme Morano, et à lui demander un sacrifice,