Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/209

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À mesure que les voyageurs montoient au travers des forêts de sapins, les roches s’élevoient au-dessus des roches, les montagnes sembloient se multiplier, et le sommet d’une éminence ne sembloit être que la base d’une autre. À la fin, ils se trouvèrent sur une petite esplanade, où les muletiers arrêtèrent leurs mules. La scène vaste et magnifique qui s’ouvroit dans le vallon, excita l’admiration générale, et madame Montoni elle-même y devint sensible. Emilie perdit un moment ses chagrins dans l’immensité de la nature. Au-delà d’un amphi-théâtre de montagnes, dont les masses paroissoient aussi nombreuses que le sont les vagues de la mer, et dont les bases étoient chargées d’épaisses forêts, on découvroit la campagne d’Italie, où les rivières, les cités, les bois, toute la prospérité de la culture s’entremêloient dans une riche confusion. L’Adriatique bornoit l’horizon. Le Pô et la Brenta, après avoir fécondé toute l’étendue du paysage, y venoient décharger leurs fertiles eaux. Emilie contempla long-temps la splendeur du monde qu’elle quittoit, et dont la magnificence sembloit ne s’étaler devant elle que pour lui causer plus de regrets. Pour elle, le monde entier ne contenoit que Valancourt ; son cœur se tournoit