Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T4.djvu/144

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à ce triste séjour, avec une douloureuse émotion et des regrets momentanés.

Rafraîchie par un zéphyr parfumé, et ramenée à une douce mélancolie, elle resta à sa fenêtre long-temps après le soleil couché. Elle observa la gradation de la nuit jusqu’au moment où le contour des montagnes couvertes d’ombres demeura seul visible à l’horizon. Un clair de lune brillant, qui succéda bientôt, vint produire sur le paysage l’effet du temps sur les événemens passés. Il en adoucit l’âpreté, et répandit sur le tout ce ton vaporeux qui affaiblit et aide à confondre les objets éloignés. Le matin de sa vie, si doucement écoulé à la Vallée ; la protection, l’amour de ses parens, s’embellissoient encore par le souvenir, comme le tableau touchant qu’elle avoit sous les yeux, et donnoient lieu à des comparaisons affligeantes. Peu disposée à supporter les entretiens grossiers de la paysanne, Emilie resta, sans souper, dans sa chambre. Elle pleuroit sur sa position périlleuse et abandonnée. Une considération nouvelle avoit achevé d’abattre son courage. Désolée, sans espoir, elle désiroit de se décharger du pesant fardeau de la vie ; elle prioit le ciel de la recevoir dans sa miséricorde, et de la rejoindre à ses parens.