Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T4.djvu/149

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Arrivée à cette éminence, Emilie vit avec plaisir les rochers qui bordoient le rivage ; les uns garnis de sapins, d’autres stériles, où l’on remarquoit seulement des blocs de marbre grisâtre, et tout au plus quelques buissons de myrtes, ou d’autres arbustes odorans. La mer unie, calme, ne faisoit aucun mouvement ; ses vagues arrivoient lentement, et mouraient tranquillement sur la plage. Emilie, en regardant la mer, pensoit à la France, pensoit aux temps passés ; elle désiroit, oh ! combien elle désiroit, que ces vagues la reportassent au pays de sa naissance.

— Ah ! disoit-elle, ce vaisseau, ce vaisseau qui fend si majestueusement les ondes, et dont les grandes voiles blanches se répètent sur leur miroir ? peut-être est-il parti pour la France ! Heureux, heureux navire ! Elle le regarda aller, dans la plus violente émotion, jusqu’à ce que les ombres du soir eussent obscurci les lointains, et l’eussent dérobé à sa vue. Le bruit monotone des vagues augmentait la tendresse qui faisoit couler ses pleurs. Ce fut long-temps l’unique son qui troubla les airs. Emilie côtoya le rivage. Tout à coup un chœur de voix se fit entendre. Elle s’arrête, elle écoute ; mais elle craint de se faire voir. La première