Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T4.djvu/155

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conspirent contre l’état. Comme dans ce cas l’accusateur ne peut pas être confronté, un homme peut perdre son ennemi et assouvir une vengeance injuste, sans crainte d’être puni ou d’être découvert. Il n’est pas surprenant que Montoni eût eu recours à cet expédient diabolique, pour perdre une personne qu’il soupçonnoit d’un attentat contre sa vie. Dans la lettre qu’il avoit combinée, il accusoit Morano de conspirer contre l’état, et essayoit de le démontrer avec cette simplicité spécieuse qu’il savoit si bien mettre en usage. Le sénat qui, dans ce temps, regardoit un soupçon comme une preuve, fit aussitôt arrêter le comte. On ne lui expliqua pas son crime, on le jeta dans une de ces prisons secrètes qui sont l’effroi des Vénitiens, et où plus d’un individu a langui, et est mort sans que ses amis aient pu le découvrir.

Morano avoit encouru le ressentiment des principaux membres de l’état : ses manières l’avaient rendu importun à plusieurs ; l’ambition, la hauteur qu’il dévoiloit trop souvent en public, le faisoient haïr des autres ; ou ne devoit pas s’attendre à ce qu’aucune pitié modérât la rigueur d’une loi, dont ses ennemis déterminoient l’application.

Montoni, pendant ce temps, faisoit tête à d’autres dangers. Son château étoit as-