Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/113

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honneur. — Je me confie sans doute à votre honneur, dit le comte ; mais puis-je aussi me fier à votre courage ? Croyez-vous pouvoir résister aux prières d’un amant aimé, qui, dans sa douleur, voudra savoir le nom de celui qui le prive de sa félicité ? — Je ne serai pas exposée à une telle tentation, monsieur, dit Emilie, avec un modeste orgueil ; je ne puis aimer long-temps une personne que je ne dois plus estimer : cependant je donne ma parole. Ses pleurs, au même instant, désavouèrent sa première assertion ; elle sentit que le temps et ses efforts pouvoient seuls déraciner une tendresse dont une estime vertueuse étoit la base, et qu’avoient fortifiée les difficultés et l’habitude.

— Je vous dirai donc tout, reprit le comte ; la conviction est nécessaire à votre paix future, et ma confidence toute entière est le seul moyen de vous la donner. Mon fils a trop souvent été témoin de la mauvaise conduite du chevalier ; il y a presque été entraîné lui-même ; il s’est livré à mille extravagances ; mais je l’ai préservé du crime et d’une perte totale. Jugez donc, mademoiselle, si un père à qui l’exemple du chevalier a presque enlevé son fils unique, n’a, pas un titre suffisant pour avertir ceux qu’i-