Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/14

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bon mousqueton qui sera de service en cas de rencontre. N’avez-vous aucune arme, monsieur ? — Oui, répliqua Dupont ; j’ai le stylet de l’infâme qui vouloit me percer. Mais réjouissons-nous d’être échappés d’Udolphe, et ne nous tourmentons pas d’un danger qui peut ne pas arriver.

La lune s’élevoit au-dessus des bois qui couvroient un des côtés de l’étroit vallon qu’ils suivoient : elle leur donnoit assez de lumière pour distinguer leur chemin, éviter les roches, qui souvent l’embarrassoient. Ils voyageoient alors à loisir, et dans le plus profond silence ; ils n’étoient point encore remis de l’étonnement où cette fuite subite les avoit jetés. L’esprit d’Emilie, particulièrement, étoit absorbé dans les émotions différentes qu’elle avoit reçues. Elle restoit dans une rêverie vague, dont la beauté de la scène et le murmure du zéphyr dans le feuillage, contribuoient à augmenter la douceur. Elle pensoit à Valancourt, elle pensoit à la France avec espoir ; elle y auroit pensé avec joie, si les premiers événemens de la soirée ne l’avoient pas épuisée. Une sensation vive étoit alors au-dessus de ses forces ; mais pendant ce temps, Emilie seule étoit l’objet des réflexions mélancoliques de Dupont. Cepen-