Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/174

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roc, et dont le faîte s’élevoit au-dessus des plus hautes cimes.

C’est-là que, dans le silence du soir, Emilie se rendoit souvent seule. Le calme du lieu influoit sur celui de son cœur, et elle revenoit au château quand l’obscurité l’obligeoit de rentrer. Souvent aussi elle visitoit cette tour qui commandoit à l’horizon, elle s’appuyoit sur ses ruines ; elle pensoit à Valancourt, et n’imaginoit pas, ce qui pourtant étoit vrai, qu’il y étoit souvent venu lui-même depuis que le château lui étoit interdit.

Un soir elle y resta fort tard. Assise sur les marches de ce vieux bâtiment, elle observoit, dans une mélancolie tranquille, le progrès des ombres sur l’espace étendu devant elle. Peu à peu la lune, qui vint à se lever, monta sur l’horizon, et revêtit successivement de sa douce lumière, les flots, les bois et la tour elle-même. Emilie pensive, contemploit et rêvoit. Tout-à-coup un son frappe son oreille ; c’étoit la voix et la musique dont quelquefois, à minuit, elle avoit entendu les accords. L’émotion qu’elle sentit, ne fut pas sans mélange de terreur, quand elle considéra son isolement. Les sons se rapprochèrent. Elle se seroit levée, mais ils sembloient venir par le chemin qu’il lui