Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/99

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vouloit pas y manquer. — Si je peux m’échapper, dit-elle, je le ferai avec plaisir.

Emilie se hâta de descendre : le comte avoit dans ses manières cette politesse inséparable de la vraie dignité ; la comtesse n’étoit pas toujours de même, mais Emilie avoit obtenu d’elle une exception. La comtesse avoit renoncé à la plupart des vertus de son sexe, et leur préféroit des qualités qu’elle leur trouvoit bien supérieures : elle n’avoit plus les grâces de la modestie ; mais elle savoit prendre un air d’assurance. Elle avoit peu conservé de cette douceur qui rend les femmes intéressantes ; mais elle prenoit dans l’occasion ce ton décisif qui en impose. En province, pourtant, elle affectoit, en général, une langueur élégante qui faisoit croire qu’elle alloit s’évanouir, lorsque sa favorite lui lisoit quelque conte sentimental ; mais sa figure ne varioit pas quand une véritable infortune venoit solliciter ses secours ; son cœur ne palpitoit pas à la pensée de la soulager : elle étoit étrangère aux plus douces jouissances de l’humanité, car jamais acte de bonté de sa part n’avoit rappelé le sourire sur les traits de l’indigence.

Le soir, le comte et sa famille, excepté la comtesse et mademoiselle Béarn, allèrent