Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/199

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du désespoir, il vouloit se livrer lui-même à la justice, avec celle qui l’avoit plongé dans l’abîme du crime. Après cette crise violente, il changea de résolution : il vit une fois Laurentini ; et ce fut pour la maudire comme l’auteur détestable de ce forfait. Il déclara qu’il n’épargnoit sa vie que pour qu’elle consacrât ses jours à la prière et à la pénitence. Accablée du mépris et de la haine d’un homme pour qui elle s’étoit rendue si coupable, frappée d’horreur pour le crime inutile dont elle s’étoit souillée, la signora Laurentini renonça au monde, et victime effrayante d’une passion effrénée, elle prit le voile à Sainte-Claire.

Le marquis partit du château de Blangy, et jamais il n’y revint. Il tâcha d’étourdir ses remords dans le tumulte de la guerre et les dissipations de la capitale. Ses efforts furent vains. Un nuage impénétrable paroissoit l’entourer ; ses plus intimes amis ne pouvoient se l’expliquer ; et il mourut enfin dans des tourmens presqu’égaux à ceux de Laurentini. Le médecin qui avoit observé l’état de la marquise après sa mort, avoit été engagé au silence à force de présens. Les soupçons de quelques domestiques se bornèrent à un murmure sourd, et jamais cette affaire n’avoit été approfondie.