Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/31

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— Jamais, dit Emilie : j’ai pensé quelque-fois qu’elle avoit dans le regard une sorte d’agrément mélancolique : je ne l’avois jamais remarqué dans ses discours. Pauvre femme ! je prierai Dieu pour elle.

— Vos prières, ma fille, dit l’abbesse, se joindront dans ce cas aux nôtres ; elle en a besoin.

— Madame, dit mademoiselle Feydeau, quelle est votre opinion sur le marquis ? L’étrange événement du château a tant excité ma curiosité, que je me permets cette question : Quel crime lui imputoit-on ? quelle est la punition dont parloit la sœur Agnès ?

— On ne peut, dit l’abbesse avec un air aussi grave que réservé, on ne peut sans défiance avancer ses idées sur un sujet si délicat. Je ne prendrai pas sur moi de prononcer que le feu marquis fût coupable, ni de dire de quel crime on l’avoit soupçonné. Quant à la punition dont parle sœur Agnès, je n’ai pas connoissance qu’il en ait souffert aucune ; elle faisoit sans doute allusion au supplice cruel que causent des remords cuisans. Prenez garde, mes chères enfans, d’encourir ce châtiment terrible ; c’est le purgatoire de cette vie. La marquise le savoit bien ; elle fut un modèle pour ceux