Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/267

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cette averse de traits décochés par ce magnanime, le tyran ne pensa plus à diriger sa lance contre Vibhîshana et sa colère fut contrainte à se détourner de lui.

Voyant que son frère était sauvé par Lakshmana, il tourna sa face vers le Soumitride et lui tint ce langage : « Puisque c’est toi qui sauves de la mort ce Vibhîshana si renommé pour sa force, eh bien ! ma lance épargne le Rakshasa, mais elle va tomber sur toi ! » Il dit ; et, brandissant à ces mots sa lance au grand bruit, aux huit clochettes, au coup toujours sûr, meurtrière des ennemis et flamboyante d’une splendeur innée, Râvana, bouillant de colère, vise Lakshmana, lui darde sa pique, ouvrage enchanté de Maga le magicien, et pousse un cri.

Enveloppée d’une lumière égale à celle de la foudre même de Çakra, cette pique, envoyée d’une effroyable vitesse, fondit sur le Soumitride au front de la bataille. Tandis que volait cette arme de fer, soudain Râma de lui adresser ces paroles à elle -même : « Que la fortune sauve Lakshmana ! Sois vaine ! N’arrive pas à ton but ! »

Il dit ; mais pendant cette pensée le trait, à la grande splendeur et flamboyant comme la langue du roi des serpents, s’abattit avec une grande fougue sur la grande poitrine de Lakshmana. Celui-ci tomba sur la terre, le cœur fendu sous le coup de cette lance que le bras impétueux du tyran avait enfoncée bien profondément. À peine Râma, qui se trouvait à ses côtés, l’eut-il vu dans ce déplorable état, que son cœur en fut tout rempli de tristesse par le vif amour qu’il portait à son frère ; il demeura un instant absorbé en lui -même, les yeux troublés de larmes ; mais bientôt, flamboyant comme le feu à la fin d’un youga : « Ce n’est pas le moment de se laisser abattre ! » L’héroïque Daçarathide, impatient d’arracher