Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/304

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ques scènes de sa vie sont racontées avec tant de détails et de précision que l’art n’y saurait rien ajouter et n’y peut rien retrancher. Mais l’ordre manque et les lacunes sont nombreuses. Sur quelques points l’imagination est irrévocablement enchaînée à la lettre des documents ; en d’autres la fantaisie a le champ libre. Il ne se peut pas des conditions plus défavorables. Et puis le désir d’être précis là où la précision n’est pas possible, semble avoir contraint l’auteur à de basses suppositions. Est-il vrai que ce « maître exquis », cet homme qui, dites-vous, a distinctement connu Dieu comme un père, ait eu recours pour régner sur les âmes aux pratiques du plus vulgaire charlatanisme ? Si réellement il en est ainsi, pourquoi respecter l’auréole dont une tradition menteuse a couronné ce front qui n’en était pas digne ? Vainement on invoque en sa faveur les complaisances de la conscience orientale. Vous l’avez placé trop haut pour qu’il puisse être au bénéfice d’une justification si grossière, et si votre sens de critique se refuse à comprendre la double nature du Jésus des croyants, le simple bon sens de vos lecteurs n’aura pas moins de peine à associer dans une seule et même figure tant d’élévation et tant de vulgarité.

Je préfère au Jésus de M. Renan (on parle de lui comme d’un peintre) sa Marie de Magdala, un autre portrait, dont la ressemblance a été fort dis-