Page:Raoul - Trois satiriques latins, vol 1 Juvénal, 1842.djvu/161

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De celle qui ne fait qu’invoquer Palémon ;
Qui ne dit pas un mot sans citer la grammaire ;
Qui vient, à tout propos, ennuyeuse antiquaire,
Habile à déterrer des écrits vermoulus,
M’assommer de vieux vers que personne n’a lus ;
Et qui, dans son amie élevée au village,
Reprend avec aigreur des fautes de langage,
Que même dans un homme ou ne remarque pas.
La grammaire est fort bonne, et j’en fais très grand cas,
Mais je veux qu’une épouse, oubliant son purisme,
Parfois à son mari permette un solécisme.

Une femme peut tout, fait tout impunément,
Lorsque d’un précieux et rare diamant,
Son collier à nos yeux étale les merveilles,
Ou que de lourds pendants allongent ses oreilles.
Qu’une épouse opulente est un pesant fardeau !
Du soin d’entretenir la fraîcheur de sa peau,
Chez elle à tout moment on la trouve occupée ;
Son visage est enduit des pâtes de Poppée :
Elle en est rebutante, et l’époux caressant,
A la glu, sur sa bouche, est pris en l’embrassant
Elle se nettoiera, si son amant l’appelle.
Qu’importe à la maison qu’on soit plus ou moins belle ?
Ce n’est que pour l’amant qu’on soigne ses attraits,
Que des parfums de l’Inde on s’inonde à grands frais
Alors le masque tombe, on lève les compresses ;
Elle entre dans un bain fourni par des ânesses
Dont, fût-elle exilée aux plus rudes climats,
Elle ferait traîner un troupeau sur ses pas.
D’emplâtres, de parfums dégoûtant assemblage,
Que dire ? est-ce un ulcère ? ou bien est-ce un visage
Mais depuis le matin suivons-la jusqu’au soir.
L’époux a-t-il, la nuit, trompé son tendre espoir ?
Gare aux femmes d’atour ! intendante, coiffeuse,
Toutes vont lui payer cette injure odieuse.