Page:Raoul - Trois satiriques latins, vol 1 Juvénal, 1842.djvu/299

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Et l’air pur des vallons qu’arrose le Bétis,
Colore sans travail sur le dos des brebis.
Tout périt, tout s’engouffre au vaste sein des ondes,
Vaisselle, argenterie, urnes assez profondes
Pour étancber la soif du centaure Pholus,
Ou pour désaltérer l’épouse d’Asylus ;
Et jusques à la coupe, ouvrage magnifique,
Dans laquelle avait bu le rusé politique
Qui, comptant sur le fer moins que sur son trésor,
Pénétra dans Olynthe avec une clef d’or.
Quel autre, de nos jours, de la mort toute prête.
Au prix de son argent, rachèterait sa tète ?
L’avare que séduit le plaisir d’entasser,
N’amasse point pour vivre, il vit pour amasser.
Catulle a préféré sa vie à sa fortune :
Sacrifice impuissant pour désarmer Neptune !
Chaque moment ajoute à l’horreur du danger ;
La tempête redouble, et, pour se dégager,
Il coupe, abat lui-même, extrémité funeste !
Le mât de son esquif, pour en sauver le reste.
Va donc, faible mortel, sous des climats lointains,
Au caprice des vents confier tes destins,
Et consens à ne voir sur un abîme immense.
Entre la mort et toi, que sept doigts de distance ;
Mais aux provisions que tu prendras à bord.
Joins des haches, avant de t’éloigner du port.
La mer plus calme enfin rassurre l’équipage.
La Parque se déride, et, lâchant les ciseaux,
D’une laine plus blanche entoure ses fuseaux.
Quelques haillons tendus et la voile de proue.
Recueillent le zéphir qui les gonfle et s’y joue.
L’Auster ne gronde plus, et Phébus de retour
Ramène l’espérance avec l’éclat du jour.
Alors on voit la cime où, fuyant Lavinie,
Ascagne tranplanta sa noble colonie,