Page:Rapport final sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté, présenté par le Rapporteur spécial, M. Leandro Despouy.djvu/33

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moins une sécurité pour l'avenir. De plus, ces emplois ne sont généralement pas porteurs de reconnaissance sociale.

139. Un témoignage d'Amérique latine donne une idée du lien entre logement et travail : "Comme je n'ai pas d'emploi, je ne peux pas obtenir de logement. Je me trouve dans un cercle vicieux, sans chance de m'en sortir. Pourtant je cherche du travail, mais quand je me présente quelque part, on me répond : 'la semaine prochaine', c'est toujours 'la semaine prochaine', mais elle n'arrive jamais."

140. Ces difficultés créent un sentiment d'humiliation et d'inutilité et la dévalorisation sociale et personnelle qu'elles entraînent peuvent aussi aller jusqu'à provoquer la rupture de la cellule familiale. Un autre homme témoigne à cet égard : "J'aime ma famille. Tous les jours je sortais tôt de chez moi à la recherche d'un travail afin d'apporter quelque chose à manger à ma femme et à mes enfants. Tous mes efforts étaient vains. Quand je rentrais chez moi le soir, je ne sais pas comment ils s'étaient débrouillés pour trouver de quoi manger. La nourriture me restait en travers de la gorge. Je me sentais inutile et en plus je leur retirais un peu de la nourriture qu'ils avaient gagnée. J'étais une charge pour eux, c'est pour ça que je suis parti."

141. Les personnes très pauvres sont ainsi dans l'impossibilité, comme le soulignait en son paragraphe 9 la Déclaration de Copenhague du Sommet mondial pour le développement social, de "contribuer au bien-être de leur famille, de leur communauté et de l'humanité".

142. Par ailleurs, les travaux de l'OIT et de l'UNICEF traduisent l'ampleur du travail des enfants dans le monde. Celui-ci est une conséquence immédiate des conditions d'extrême pauvreté que vivent leurs parents. La plus grande partie de ces travailleurs mineurs sont exposés à des conditions assimilables à l'esclavage, qui constituent un déni des droits de l'homme et en particulier des dispositions des articles 4 et 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Les conclusions du Groupe de travail de la Sous-Commission sur les formes contemporaines d'esclavage et celles des organes chargés de l'application des Conventions de l'OIT fournissent de nombreux éléments pertinents à cet égard (Voir les rapports du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage.).

5. Le droit à la santé

143. Ce droit est reconnu dans l'article 25 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Il est qualifié par l'article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels comme "le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique ou mentale qu'elle soit capable d'atteindre". Le droit à la santé fait l'objet de l'ensemble de l'activité de l'Organisation mondiale de la santé qui a lancé un programme "Santé pour tous d'ici l'an 2000" et a remarquablement démontré l'impact de l'extrême pauvreté sur la santé dans son rapport de 1995.

144. Il a été vu précédemment comment les conditions de vie dans l'extrême pauvreté exposent les très pauvres à de graves dangers pour leur santé. Les statistiques disponibles montrent aussi que le taux de mortalité est particulièrement élevé dans les populations très pauvres et que l'espérance de vie y est considérablement réduite (Voir Rapport sur la santé dans le monde, OMS, 1995.). Les grossesses et les naissances