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des deux Indes.
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Grecs & les Romains. Cet eſprit a fait moins de ravages que celui des converſions ; mais il s’oppoſe cependant à la communication des hommes : c’eſt une barrière de plus entre les peuples.

En conſidérant que la nature a tout fait pour le bonheur de ces fertiles contrées ; qu’à la facilité de ſatisfaire tous leurs beſoins, les Indiens joignent un caractère compatiſſant, une morale qui les éloigne également de la perſéçution & de l’eſprit de conquête : on ne peut s’empêcher de remonter, en gémiſſant, juſqu’à la ſource de cette inégalité barbare, qui a réuni dans une partie de la nation les privilèges & l’autorité, & raſſemblé ſur le reſte des habitans les calamités & l’infamie. Quelle eſt la cauſe de cet étrange délire ? N’en doutons point ; c’eſt la même qui perpétue ſur ce globe déplorable le malheur de tous les peuples.

Il ſuffit qu’une nation puiſſante & peu éclairée adopte une première erreur, que l’ignorance accrédite : bientôt cette erreur, devenue générale, va ſervir de base à tout le ſyſtême moral & politique : bientôt les penchans les plus honnêtes vont ſe trouver en