Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/108

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ſe dit ſecrètement en lui-même : tôt ou tard, cette bête féroce ſera la plus forte. Il prend en dédain un domicile auſſi précaire, & ſa maiſon en bois ou en pierre à Amſterdam, n’eſt plus ſa maiſon ; c’eſt ſon vaiſſeau qui eſt ſon aſyle, & peu-à-peu il prend une indifférence & des mœurs conformes à cette idée. L’eau eſt pour lui, ce qu’eſt le voiſinage des volcans pour d’autres peuples.

Si à ces cauſes phyſiques de l’affoibliſſement de l’eſprit patriotique, ſe joignoit la perte de la liberté, les Hollandois ne quitteroient-ils pas un pays qui ne peut être cultivé que par des hommes libres ? Ce peuple négociant porteroit ailleurs ſon eſprit de commerce avec ſon argent. Ses iſles de l’Aſie, ſes comptoirs d’Afrique, ſes colonies du Nouveau-Monde, tous les ports de l’Europe, lui ouvriroient un aſyle. Quel ſtadhouder, quel prince révéré chez un tel peuple, voudroit, oſeroit en être le tyran ?

Un ambitieux inſensé, un guerrier féroce, ſi l’on veut. Mais parmi ceux qui ſont préposés au gouvernement des nations, cette eſpèce d’hommes eſt-elle donc ſi rare ? Tout ſemble conſpirer pour donner ſur ce point

important