Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/117

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au lieu de l’imiter pour ſe faire aimer ; quand le droit originel de la ſociété, le droit inaliénable de la propriété des citoyens, les conventions nationales, les engagemens du prince ſont en vain réclamés ; enfin quand le gouvernement eſt arbitraire, il n’y a plus d’état : ce n’eſt plus que la terre d’un ſeul homme.

Dans ces ſortes de pays, il ne ſe formera point des hommes d’état. Loin que ce ſoit un devoir de s’inſtruire des affaires publiques, c’eſt un crime, un danger d’être éclairé ſur l’adminiſtration. Là, comme dans le miniſtère de l’égliſe, la vocation s’appelle grâce ; on l’obtient par des prières. La faveur de la cour, le choix du prince, ſuppléent aux talens. Ce n’eſt pas qu’ils ne ſoient utiles ; on en a beſoin quelquefois pour ſervir, jamais pour commander. Auſſi dans ces contrées, le peuple finit par ſe laiſſer gouverner, pourvu qu’on le laiſſe dormir. Une ſeule légiſlation mérite d’être obſervée dans ces belles régions de l’Europe ; c’eſt le gouvernement de Veniſe. Cet état préſente trois grands phénomènes ; ſa fondation première ;