Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/161

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L’Europe auroit à déſirer que les ſouverains, convaincus de la néceſſité de perfectionner la ſcience du gouvernement, vouluſſent imiter un établiſſement de la Chine. Dans cet empire, on diſtingue les miniſtres en deux claſſes, celle des penſeurs & celle des ſigneurs. Tandis que la dernière eſt occupée du détail & de l’expédition des affaires, la première n’a d’autre travail que de former des projets, ou d’examiner ceux qu’on lui préſente. Au ſentiment des admirateurs du gouvernement Chinois, c’eſt la ſource de tous les réglemens judicieux qui font régner dans ces régions la légiſlation la plus ſavante, par l’adminiſtration la plus ſage. Toute l’Aſie eſt ſous le deſpotiſme : mais en Turquie, en Perſe, c’eſt le deſpotiſme de l’opinion par la religion ; à la Chine, c’eſt le deſpotiſme des loix par la raiſon. Chez les Mahométans, on croit à l’autorité divine du prince : chez les Chinois, on croit à l’autorité naturelle de la loi raiſonnée. Mais dans ces empires, c’eſt la perſuaſion qui meut les volontés.

Dans l’heureux état de police & de lumière où l’Europe eſt parvenue, on ſent bien que