Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/31

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auroit eu pendant la durée de vingt ſiècles, avant ou ſans cette ſublime inſtitution. C’eſt ainſi qu’on fait la ſatyre des premiers fondateurs des nations, par la ſuppoſition d’un état ſauvage, idéal & chimérique. Jamais les hommes ne furent iſolés, comme on les montre ici. Ils portèrent en eux un germe de ſociabilité qui tendoit ſans ceſſe à ſe développer. Ils auroient voulu ſe séparer, qu’ils ne l’auroient pu ; ils l’auroient pu, qu’ils ne l’auroient pas dû, les vices de leur aſſociation ſe compenſant par de plus grands avantages.

La foibleſſe & la langueur de l’enfance de l’homme ; la nudité de ſon corps ſans poil & ſans plume ; la perfectibilité de ſon eſprit, ſuite néceſſaire de la durée de ſa vie ; l’amour maternel qui croît avec les ſoins & les peines, qui, après avoir porté ſon fruit neuf mois dans les entrailles, l’allaite & le porte des années entières dans ſes bras ; l’attachement réciproque, né de cette habitude entre deux êtres qui ſe ſoulagent & ſe careſſent ; la multiplication des ſignes communicatifs dans une organiſation, qui joint aux accens de la voix, communs à tant d’animaux, le langage des