Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/41

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tinuel des émigrations, empêchèrent les loix de ſe fixer nulle part. Comme une foule de petits peuples avoit détruit une grande nation, pluſieurs chefs ou tyrans dépecèrent en fiefs chaque vaſte monarchie. Le peuple, qui n’a rien gagné dans le gouvernement d’un ſeul homme ou de pluſieurs, fut toujours écrasé, mutilé, foulé par ces démembremens de l’anarchie féodale. C’étoient de petites guerres continuelles entre des bourgs voiſins, au lieu de nos grandes & ſuperbes guerres de nation à nation.

Cependant, une fermentation continuelle conduiſoit les nations à prendre une forme, une conſiſtance. Les rois voulurent s’élever ſur les ruines de ces hommes ou de ces corps puiſſans, qui perpétuoient les troubles ; & ils employèrent, pour y réuſſir, le ſecours du peuple. On le mania, on le façonna, on le polit, & on lui donna des loix plus raiſonnées qu’il n’en avoit eues.

La ſervitude avoit abattu ſa vigueur naturelle ; la propriété lui rendit du reſſort, & le commerce, qui ſuivit la découverte du Nouveau-Monde, augmenta toutes ſes facultés, en répandant une émulation univerſelle.