Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/434

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même aux grandes idées, aux ſublimes vérités où l’appelle la fierté naturelle du peuple qui la parle.

Avant toutes les autres langues vivantes, eſt l’Allemand, cette langue mère, originelle eſt indigène de l’Europe. C’eſt elle qui a formé l’Anglois & même le François par ſon mélange avec la langue latine. Mais peu faite, ce ſemble, pour les yeux & pour des organes polis, elle eſt reſtée dans la bouche du peuple ſans oſer entrer que bien tard dans les livres. Sa diſette d’écrivains annonçoit un pays où les beaux-arts, la poéſie & l’éloquence ne devoient pas fleurir. Mais tout-à-coup le génie y a pris ſon eſſor ; & des poètes originaux en plus d’un genre y ſont éclos en aſſez grand nombre, pour entrer en rivalité avec les autres nations.

Les langues ne pouvoient ſe cultiver & ſe polir juſqu’à un certain degré, ſans que les arts de toute eſpèce ne ſuiviſſent ce degré de perfection. Auſſi leurs monumens ſont-ils tellement multipliés en Europe, que la barbarie des ſiècles & des peuples à venir aura de la peine à les détruire entièrement.