Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/234

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y ſeront-ils moins féroces que ceux qui ſe ſont emparés du continent ? Les habitans renfermés dans ces eſpaces limités, ſubiront-ils le ſort déplorable des Péruviens, des Mexicains & des Bréſiliens ? Des hommes civilisés ayant tous vécu dans leur patrie ſous des gouvernemens, ſinon ſages du moins anciens ; ayant tous été nourris dans des foyers où ils avoient reçu les leçons & quelquefois l’exemple des vertus ; tous élevés au centre de villes policées où l’exercice d’une juſtice sévère les avoit accoutumés à reſpecter leurs ſemblables, auront-ils tous, tous ſans exception, une conduite que l’humanité, leur intérêt, leur sûreté, les premières lueurs de la raiſon proſcrivent également, & continueront-ils à devenir plus barbares que le ſauvage ? En ſerai-je donc réduit à ne tracer que d’affreux tableaux ? Bon Dieu ! À quel miniſtère étois-je réſervé ? Cette métamorphoſe de l’Européen expatrié eſt un phénomène ſi étrange ; l’imagination en eſt ſi profondément affectée, que tandis qu’elle s’en occupe avec étonnement, la réflexion ſe tourmente pour en découvrir le principe, ſoit dans la nature