Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/43

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dieux du paganiſme, fruit du libertinage & de l’hoſpitalité. La plupart durent la naiſſance à des paſſagers à qui l’on avoit accordé le coucher & qu’on ne revit plus.

Qu’il ſoit permis de le dire, il n’y a point d’état plus immoral que celui de voyageur. Le voyageur par état reſſemble au poſſeſſeur d’une habitation immenſe qui, au lieu de s’aſſeoir à côté de ſa femme, au milieu de ſes enfans, emploieroit toute ſa vie à viſiter ſes appartemens. La tyrannie, le crime, l’ambition, la misère, la curioſité, je ne ſais quelle inquiétude d’eſprit, le déſir de connoître & de voir, l’ennui, le dégoût d’un bonheur usé, ont expatrié & expatrieront les hommes dans tous les tems.

Mais dans les ſiècles antérieurs à la civiliſation, au commerce, à l’invention des ſignes repréſentatifs de la richeſſe, lorſque l’intérêt n’avoit point encore préparé d’aſyle au voyageur, l’hoſpitalité y ſuppléa. L’accueil fait à l’étranger fut une dette ſacrée que les deſcendans de l’homme accueilli acquittoient ſouvent après le laps de pluſieurs ſiècles. De retour dans ſon pays, il ſe plaiſoit à raconter les marques de bien-