Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/45

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nous éloigne des lieux qui pourroient nous en rappeler l’idée, les Bréſiliens regardoient les leurs avec attendriſſement, racontoient leurs exploits avec complaiſance, louoient leurs vertus avec tranſport. On les enterroit debout dans une foſſe ronde. Si c’était un chef de famille, on enſeveliſſoit avec lui ſes plumes, ſes colliers, ſes armes. Lorſqu’une peuplade changeoit de demeure, ce qui arrivoit ſouvent ſans d’autre motif que La fantaiſie de ſe déplacer, chaque famille mettoit des pierres remarquables ſur la foſſe de ſes morts les plus reſpectés. Jamais on n’approchoit de ces monumens de douleur, ſans pouſſer des cris effrayans, aſſez ſemblables à ceux dont on faiſoit retentir les airs quand on alloit combattre.

L’intérêt ni l’ambition ne conduiſoient jamais les Bréſiliens à la guerre. Le déſir de venger leurs proches ou leurs amis, fut toujours le motif de leurs diviſions les plus ſanglantes. Ils avoient pour orateurs, plutôt que pour chefs, des vieillards qui décidoient les hoſtilités, qui donnoient le ſignal du départ, qui, pendant la marche, s’abandonnaient aux expreſſions d’une haine im-