Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/199

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La vue de tant d’infortunés inſpira un grand éloignement pour la compagnie des Indes qu’on rendoit reſponſable de ces calamités. Cette averſion, née de la compaſſion ſeule, ne tarda pas à ſe changer en une haine profonde ; & ce ne fut pas ſans de grands motifs.

Depuis leur établiſſement, les colonies Françoiſes recevoient leurs eſclaves des mains du monopole, & en recevoient par conséquent fort peu & à un prix exorbitant. Réduit, en 1713, à l’impoſſibilité de continuer ſes opérations languiſſantes, le privilège aſſocia lui-même à ſon commerce les négocians particuliers, ſous la condition qu’ils lui paieroient quinze livres pour chaque noir qu’ils porteroient aux iſles du Vent, & trente pour ceux qu’ils introduiroient à Saint-Domingue. Cette nouvelle combinaiſon fut ſuivie d’une telle activité, que le gouvernement commença enfin à ſe détacher de l’excluſif, en conférant, en 1716, la traite de Guinée aux ports de Rouen, de Bordeaux, de Nantes & de la Rochelle. Il devoit leur en coûter deux piſtoles pour chaque eſclave qui arriveroit en Amérique : mais les denrées qui proviendroient de la vente de ces mal-