Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/114

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Des François & des ſauvages s’étoient réunis pour une expédition qui demandoit une longue marche. Les proviſions leur manquèrent en chemin. Les Hurons chaſſoient, abattoient beaucoup de gibier, & ne manquoient jamais d’en offrir aux François, moins habiles chaſſeurs. Ceux-ci vouloient ſe défendre de cette généroſité. Vous partagez avec nous les fatigues de la guerre, leur dirent les ſauvages ; il eſt juſte que nous partagions avec vous les alimens de la vie, nous ne ſerions pas hommes d’en agir autrement avec des hommes. Si quelquefois des Européens ont été capables de cette grandeur d’âme, voici ce qui n’appartient qu’à des ſauvages.

Un corps d’Iroquois averti qu’un parti de François & de leurs alliés s’avançoit avec des forces ſupérieures, ſe diſperſa précipitamment. Un Onnontagué qui menoit cette troupe, âgé de cent ans, dédaigna de fuir, & préféra de tomber entre les mains des ſauvages ennemis, quoiqu’il n’en pût attendre que des tourmens horribles. Quel ſpectacle ce fut de voir quatre cens barbares acharnés autour d’un vieillard qui, loin de pouſſer un ſoupir, traitant les François avec un profond

mépris,