Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/44

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un grand nombre de ces mots imitatifs qui peignent les choſes par le ſon. Les dialectes qui en dérivoient, ſe multiplioient preſqu’autant que les bourgades. On n’y remarquoit point de termes abſtraits, parce que l’eſprit des ſauvages, eſprit encore enfant, ne s’écarte guère loin des objets & des tems préſens ; & qu’avec peu d’idées on a rarement beſoin de les généraliſer, & d’en repréſenter pluſieurs dans un ſeul ſigne. Mais d’ailleurs le langage de ces peuples preſque toujours animé d’un ſentiment prompt, unique & profond, remué par les grandes ſcènes de la nature, prenoit dans leur imagination ſenſible & forte, un caractère vivant & poétique. L’étonnement & l’admiration, dont leur ignorance même les rendoit ſuſceptibles, les entrainoient violemment à l’exagération. Leur âme s’exprimoit comme leurs yeux voyoient : c’étoit toujours des êtres phyſiques qu’ils retraçoient avec des couleurs ſenſibles, & leurs diſcours devenoient pittoreſques. Au défaut de termes de convention pour rendre certaines idées composées ou compliquées, ils employoient des expreſſions figurées. Le geſte, l’attitude