Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/53

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frimats & de la famine, formèrent, des débris de leur navire, un radeau qui, au printems, les conduiſit dans le continent. Une cabane de ſauvages s’offrit à leurs regards expirans. Mes frères, leur dit affectueuſement le chef de cette famille ſolitaire, les malheureux ont droit à notre commisération & à notre aſſiſtance ; nous ſommes hommes, & les misères de l’humanité nous touchent dans les autres comme dans nous-mêmes. Ces expreſſions d’une âme tendre, furent ſuivies de tous les ſecours qui étoient au pouvoir de ces généreux ſauvages.

Européens, ſi fiers de vos gouvernemens, de vos loix, de vos inſtitutions, de vos monumens, de tout ce que vous appeliez votre ſageſſe, permettez que je vous arrête un moment. Je viens de vous expoſer avec ſimplicité & ſans art le tableau de la vie & des mœurs du ſauvage. Je ne vous ai ni diſſimulé ſes vices, ni exagéré les vertus, La ſenſation que mon récit vous a fait éprouver, je vous demande de la conſerver juſqu’à ce que le plus beau génie, l’homme le plus éloquent d’entre vous ait apprêté ſes crayons & vous ait peint avec toute la force,